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mercredi 20 mai 2015

Après le Livre blanc sur la défense, un Livre blanc européen ?


C’est du moins ce que préconise le Parlement européen dans un rapport voté en session plénière. Il s'agit d'un document visant à dresser un panorama complet des dernières avancées de la politique européenne de défense….qui peine à décoller !  (à lire sur securiteinterieure.fr : De l'Europe de la défense à la défense européenne).

Ce rapport, adopté en commission en mars, va être adopté en plénière en même temps que deux autres rapports :
  • un rapport sur le financement de la politique de sécurité et de défense commune;
  • un rapport sur l'incidence des évolutions des marchés européens de la défense sur les capacités de sécurité et de défense en Europe.

La politique européenne de défense a donc des difficultés à décoller. En effet, le bilan n’est pas reluisant ! Les députés tapent du poing sur la table face à l’inertie des Etats dans ce domaine (à lire sur securiteinterieure.fr : Drame en Méditerranée : les députés européens rappellent les enjeux de sécurité tout en mettant les Etats face à leurs responsabilités).

Plus précisément, dans cette résolution faisant un état de l'action entreprise concernant la politique européenne de défense, ils  estiment regrettable, "en particulier face au climat de plus en plus instable qui règne aux portes de l'Europe, que l'impulsion politique donnée par les chefs d’Etat et de gouvernement en 2013 ne se soit pas traduite par un renforcement de la coopération et par la mise en œuvre rapides de mesures concrètes et efficaces, à la hauteur des ambitions énoncées"  (à lire sur securiteinterieure.fr : Le Livre blanc sur la Défense de 2013 et la sécurité intérieure).

Par ailleurs, ils invitent la Haute Représentante pour les affaires étrangères à lancer une vaste initiative en vue d'élaborer un livre blanc plus ambitieux sur la sécurité et la défense européennes, le but étant de rationaliser les ambitions stratégiques et les processus de développement des capacités de l'Union (à lire sur securiteinterieure.fr : L'Assemblée nationale plaide en faveur d'un "Livre blanc européen sur la Défense").

L’essentiel

Le Parlement européen :
  • déplore les problèmes persistants de constitution des forces éprouvés lors du lancement des missions militaires. Il considère qu'aujourd'hui l'Union ne dispose pas encore des moyens opérationnels, capacitaires et industriels lui permettant de contribuer de manière décisive à la prévention et à la gestion de crises internationales et d'affirmer sa propre autonomie et ses intérêts stratégiques, comme le traité de Lisbonne;
  • reconnaît en particulier que l'absence d'attitude constructive de la part de tous les États membres a été un obstacle politique et opérationnel au déploiement des groupements tactiques de l'Union (GTUE) ;
  • attire l'attention sur le fait que les programmes de l'Union dans d'autres domaines, tels que la sécurité intérieure et aux frontières, la gestion des catastrophes et le développement, constituent une occasion non négligeable de développer conjointement les capacités dans le cadre de ces politiques et de la conduite des missions de la politique européenne de défense;
  • invite la Commission également à créer un lien permanent entre les organes et agences de l'Union européenne dans les domaines de la sécurité intérieure (Frontex, Europol, ENISA), de la sécurité extérieure et de la défense (Agence européenne de défense, Service européen d’action extérieure).

Impulsion et direction politique de la politique

Le Parlement européen :
  • s'étonne qu'il n'existe toujours pas de stratégie commune à l'échelle européenne pour relever les nouveaux défis qui menacent la sécurité de l'Union. Il invite l’élaboration d’un livre blanc en rappelant que la réflexion  autour de ce document a pour but d'élaborer une nouvelle stratégie européenne commune en matière de sécurité :
    • soit capable de cerner les nouveaux scénarios géostratégiques, les nouvelles menaces et les nouveaux défis planétaires ;
    • vise également à déterminer les mesures que l'Union peut prendre pour y faire face, notamment dans le cadre de la politique européenne de défense;
  • salue l'intention du Conseil et la volonté de la Haute Représentante pour les affaires étrangères d'amorcer une réflexion stratégique sur les défis et les perspectives de la politique étrangère et de sécurité;
  • attend la future communication de la Haute Représentante pour les affaires étrangères destinée à évaluer les effets de ces évolutions sur la conjoncture mondiale et à cerner les défis et les perspectives qui en découlent pour l'Union européenne.
  • salue les conclusions du Conseil de décembre 2013, qui reconnaissent la nécessité de renforcer la politique européenne de défense et il souligne que le Conseil européen de juin 2015 devra encourager les États membres récalcitrants à investir davantage de moyens dans la défense et concentrer ses efforts sur les aspects de la gestion des crises auxquels l'Union peut apporter une réelle valeur ajoutée ;
  • demande à la Haute Représentante pour les affaires étrangères d'étudier également le potentiel des autres articles pertinents du traité de Lisbonne, notamment ceux portant sur le fonds de lancement (article 41 du traité UE), sur la coopération structurée permanente (article 46 du traité UE), sur la clause de solidarité (article 222 du traité FUE) et sur la clause de défense mutuelle (article 42 du traité UE);

Missions et opérations de la politique européenne de défense

Le Parlement européen :
  • constate avec inquiétude que les dernières opérations civiles et militaires de la politique européenne de défense continuent de souffrir des lacunes structurelles connues depuis de nombreuses années: 
    • manque d'efficacité dans la réaction immédiate à des actions civiles et militaires, 
    • processus décisionnels longs et rigides, 
    • nécessité de renforcer la solidarité entre États membres dans le financement des missions, 
    • inadéquation des mandats des missions avec leur environnement d'évolution, 
    • problème de constitution des forces, manque de réactivité logistique et de moyens financiers;
  • considère que la question du financement des missions et opérations de la politique européenne de défense est cruciale si l'on souhaite assurer l'avenir de cette politique; regrette que le débat lancé par le Conseil de décembre 2013 sur ce sujet n'ait pour l'instant abouti à aucune proposition concrète;
  • note que les missions civiles et militaires lancées par l'Union européenne depuis 2009 ont trop souvent été conçues pour donner de la visibilité à ses réactions face aux crises et non comme des instruments stratégiques fondés sur une analyse et une planification approfondies;
  • estime que ces missions civiles et militaires devraient être de véritables outils politiques, opérationnels, efficaces et responsables, qui s'intègrent dans une stratégie d'action globale, en particulier dans le voisinage de l'Union; soutient le réexamen des structures de gestion des crises actuellement en cours au sein du Service européen d’action extérieure;
  •  constate que les opérations militaires de la politique européenne de défense sont de plus en plus des missions axées sur la formation des forces armées (EUTM Mali et EUTM Somalie). Il se félicite de la décision d'entreprendre ces opérations mais il :
    • insiste pour que leur mandat soit adapté aux circonstances de chaque situation; estime que les unités formées doivent être entièrement opérationnelles, autrement dit qu'elles doivent posséder une capacité offensive;
    • regrette que des missions avec mandat exécutif soient désormais rarement envisagées;
    • estime qu'au vu des menaces persistantes dans son voisinage, l'Union européenne ne peut pas se permettre de se focaliser uniquement sur les instruments d'après-crise ou d'accompagnement de sortie de crise et qu'elle doit pouvoir intervenir sur l'ensemble du spectre de gestion des crises.

Capacités européennes en matière de défense

Le Parlement européen :
  • souligne la nécessité d'une approche commune et coopérative dans la résolution des problèmes de constitution des forces;
  • note que le Conseil, en novembre 2013, a exprimé son intention de renforcer la modularité et la flexibilité des groupements tactiques de l'Union (GTUE) afin qu'ils puissent être déployés pour tout type de tâches de gestion de crise. Pourtant, il constate que jusqu'à présent, la seule avancée a été celle – très limitée – d'envisager que le transport stratégique des GTUE vers les théâtres d'opérations soit pris en charge par le mécanisme de financement dit « Athéna »;
  • demande que la possibilité de recourir – selon des formes qui respectent une indispensable modularité – à des états-majors multilatéraux qui ont fait la preuve de leur efficacité sur le terrain, comme l'Eurocorps de Strasbourg, soit sérieusement étudiée;

En outre, le Parlement européen :
  • considère que les effets de la crise économique et financière de 2008 ont entraîné la réduction des budgets de défense nationaux et que cette réduction s'est effectuée sans aucune coordination entre les États membres, une situation qui menace l'autonomie stratégique de l'Union;
  • souligne l'importance de planifier au préalable les investissements stratégiques dans les acquisitions et les rénovations de matériel entre les États membres;
  • salue l'adoption, lors du Conseil du 18 novembre 2014, d'un cadre politique pour la coopération systématique et à long terme en matière de défense, qui s'appuie sur la convergence des processus de planification des capacités et sur l'échange d'informations;
  • souligne que, dans le même but, il est nécessaire que les États membres poursuivent la mise en œuvre du code de conduite de l'Agence européenne de défense en matière de mutualisation et de partage des équipements, afin d'anticiper beaucoup plus efficacement les lacunes capacitaires à venir et de systématiser la coopération pour le développement des capacités;
  • invite 
    • les États membres, face à l'augmentation non coordonnée de la coopération bilatérale ou multilatérale en matière de défense, à engager une coopération structurée permanente (CSP) afin de mieux coordonner et utiliser les financements européens pour la coopération en temps de paix;
    • invite la Haute Représentante pour les affaires étrangères à présenter des plans réalistes pour réussir le lancement de la CSP.

Enfin, le Parlement européen :
  • salue l'adoption par le Conseil, en novembre 2014, du plan de développement des capacités (document de l'AED) (document du Conseil) de l'Agence européenne de défense, qui fixe 16 priorités en la matière. Il salue également le travail effectué par l'Agence européenne de défense au travers de la Codaba, qui recense les possibilités de coopération entre États membres et qui ouvre ainsi la voie à diverses formes de coopération;
  • estime que les États membres devraient poursuivre les projets de mutualisation et de partage, en se concentrant sur les 16 seize domaines capacitaires qu'ils ont identifiés avec l'Agence européenne de défense et l'État-major de l'Union européenne au travers de la politique européenne de défense;
  • salue à ce titre que les progrès effectués dans le domaine du ravitaillement en vol, avec l'acquisition d'une flotte d'avions. Il regrette en revanche qu'un nombre très limité d'États membres aient participé à ce jour à ce projet;
  • insiste sur la nécessité d'éviter la duplication des initiatives déjà en cours ailleurs et à œuvrer davantage à recenser les moyens de créer une réelle valeur ajoutée;
  • s'étonne qu'il n'existe toujours pas de dispositifs d'incitations fiscales à la coopération et à la mutualisation au niveau européen; prend acte de l'appel lancé par le Conseil en décembre 2013 pour que de tels dispositifs soient étudiés et regrette qu'en un an, les discussions n'aient encore abouti à aucune mesure concrète dans ce domaine ;
  • rappelle que depuis l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne, les politiques industrielles, spatiales et de recherche de l'Union européenne s'étendent au domaine de la défense. Il invite à ce titre la Commission à mettre en place des procédures permanentes de coopération, dans les domaines du marché commun, de l'industrie, de l'espace, de la recherche et du développement, avec :
    • le Service européen d’action extérieure,
    • l'Agence européenne de défense 
    • les États membres .

(synthèse du texte par securiteinterieure.fr)



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